La moto francoricaine
Avinton Roadsterpar Ponpon
L’Avinton Roadster réunit le meilleur de l’Europe et de l’Amérique dans une seule moto. La finesse et l’orfèvrerie du vieux continent alliées à la démesure yankee. Un pont au-dessus de l’atlantique, fabriqué à la main et à l’unité, en France.
175 kilos pour 120 chevaux et 16,5 mkg de couple. L’article pourrait s’arrêter là . 175 kilos, c’est le poids d’une moto-école. 120 chevaux, c’est la puissance d’une 600 supersport. Mais surtout, 16,5 mkg, c’est le couple d’une grosse Harley-Davidson. Ça vous parle ? Non ? Alors prenez une Twingo. Enlevez le moteur. Remplacez-le par un moteur de camion. Bravo, vous venez de construire le pendant auto de l’Avinton Roadster. Et effectivement, ça ne rentre pas.
35 000 euros de couple et de luxe. Cette moto est une antithèse de la banalité.
Sauf que Cedric Klein, le propriétaire de la marque Avinton, il a un pied-de-biche magique grâce auquel il parvient à faire rentrer un moteur bicylindre de 1,6 litres de cylindrée dans un châssis aussi court et étroit qu’une GP 250. 85 mm de chasse et 1380 mm d’empattement. Les connaisseurs apprécieront. Pour les autres, retenez juste que c’est diablement court. Et qu’une moto courte, c’est vif. Le calcul est vite fait. Moto vive + moteur bourré de couple = Dynamite sur deux roues.
Terrain miné
Du coup, rien qu’en chauffant sur sa béquille, l’Avinton m’a fait flipper. La qualité de fabrication confine au sublime et les coups de pistons de l’énorme bicylindre semblent vouloir l’arracher du cadre. Une impression validée une fois au guidon. Je regarde la poignée droite, la moto avance de 10 mètres. Le couple phénoménal ne ressemble à rien de connu et les vibrations me troublent la vision lors des phases de ralentissement. Mes mains s’agrippent à un guidon qui tremble autant qu’un vibromasseur et la sonorité résonne jusque dans ma cage thoracique.
Mes mains s’agrippent à un guidon qui tremble autant qu’un vibromasseur.
Bref, une Avinton, c’est une expérience organique. Un engagement total du pilote. Heureusement, la chose est facilitée par une partie-cycle vive et bien pensée. Entendez par là que cette moto entre en courbe avec naturel, possède un freinage tout simplement parfait et peut prendre autant d’angle qu’une MotoGP. Sans ce moteur bourré d’inertie, elle en deviendrait même facile, signe d’une conception intelligente et homogène. Mais les pièces en mouvement sont si lourdes que chaque révolution moteur influe énormément sur le comportement global de la moto. Eh oui, une Avinton, c’est pas pour les débutants.
Double nationalité
Sauf qu’il y a un souci. Ce moteur provient de chez S&S. S&S, c’est une référence en termes de moteurs qui arrachent.
Oui, mais S&S, c’est dans le Wisconsin. Et, sauf mouvement tectonique relativement peu probable, le Wisconsin, c’est de l’autre côté de l’Atlantique. Notre Avinton possède donc un cœur américain. Et comme son moteur est l’âme de cette moto, c’est assez embêtant.
Avinton, c’est la démesure américaine alliée à l’orfèvrerie française.
La seule moto française encore produite et dont on peut vraiment être fier, elle est ricaine. Sauf que ce cœur américain est alimenté par du sang français.
Vous ne pigez pas ? Je vous la fais courte. On est au XVIIIe siècle. L’Amérique est encore une colonie britannique. Et comme à cette époque, les Français n’aiment rien d’autre que pisser sur les pompes des Anglais (et vice-versa), ils ont apporté un soutien massif aux indépendantistes américains et ont donc largement contribué à la fondation des Etats-Unis. Juste histoire de fragiliser la puissance des rosbifs sur la scène internationale. Bref, sans la France, l’Amérique serait encore une province anglaise et on y produirait des Royal Enfield. L’Histoire a tranché. Cette Avinton est bien 100% française. Fin du débat.